jeudi, juin 16, 2005

31 décembre 1999

- Mais où as-tu appris tout ça ?
- Parfois il suffit juste de réfléchir ...
- Oui, je sais mais par où commencer ?
"Par où commencer" telle était la phrase qui m'avait poussé à accepter ce travail et à écrire ce journal. Ces hommes savaient que si je commençais cela, j'irai jusqu'au bout... un de mes points stupides d'honneur que je m'étais fixé et dont je ne pouvais me défaire. Il était 20:02 en ce 31 décembre 1999 et il ne me restait que 4 heures pour mener à bien ma ... mission et j'avais mal à la tête. Pour l'événement qu'était le passage en l'an 2000, des TV avaient été installées partout retransmettant les festivités mondiales. Les écrans géants pullulaient dans la ville. C'était comme si "Blade Runner" était devenu la réalité d'autant plus qu' Harrison Ford était décédé d'un arrêt cardiaque lors de la suite de ce film, 2 mois auparavant. Les choses allaient mal depuis 6 mois. Le soi-disant remède contre le virus HIV avait été un désastre rétablissant les malades pendant 4 mois pour les amener ensuite directement au stade terminal. De plus, plusieurs millions de personnes hantées par le virus avaient achetées cette pilule miracle et avaient eux aussi succombées faute d'anti-corps. L'ambiance était tendue entre les prévisions de bonheur, de "party" et la fin du monde imminente. Des brigades anti-émeutes circulaient dans toute la ville, ce qui avait pour but inverse d'échauffer tous les esprits.

Moi-même, j'étais devenu des plus paranoïaques et de nombreuses choses, où que j'aille me semblaient suspectes. Après m'être fait virer de mon emploi de chimiste pour insubordination, voie de fait, laisser-aller et vol de substances illicites, j'ai cherché dans un autre domaine mais étant donné que maintenant chacun possédait une place précise, dans un ordre bien particulier afin d'obtenir un emploi ou une indemnité, il aurait fallu que j'attende près de 5 ans afin d'avoir droit à quelque chose compte tenu de mes antécédents professionnels.
Tout ce système était maintenant hiérarchisé. Il n'y avait pratiquement plus de travail. Tout était sous contrôle du gouvernement et le gouvernement choisissait de donner tel emploi à telle personne selon une capacité jugée par le susnommé gouvernement. Sa politique fonctionnait maintenant sous le mode répression. Toutes ces peines de mort pour laisser plus de place. La plupart des meurtriers pris sur le vif étaient abattus sur place et de nombreuses bavures étaient commises. Peu importait cela servait à réduire le nombre de la population : trop de monde, trop de bruit, plus de travail, pas de nourriture, pas de logement. Il fallait faire quelque chose. Il fallait sauver le monde car vu de là, il agonisait.
La plupart des personnes qui avaient pris les pilules anti-HIV positive avaient été des personnes importantes, certaines avaient contracté le virus, d'autres pas, mais cela avait surtout désarçonné la société car les journaux signalaient en gros titres que c'étaient les "mauvaises" personnes qui mouraient et que bientôt il n'y aurait plus d'intelligentsia. Je souriais doucement en lisant cela car le plupart de ces personnes avaient été de fieffés menteurs et voleurs malgré leurs prouesses indéniables en paroles et écriture. Je me félicitais de ne pas être aussi intelligent. Comme d'habitude, les louanges arrivaient facilement après la mort.
"Ce sont toujours les meilleurs qui partent les premiers" pensais-je sans arrière pensée ou presque.
J'avais du mal à excuser l'attitude de certains policiers mais souvent, ceux qui ont les mains les plus sales sont intouchables. J'avais moi-même commis des erreurs et j'en avais payé le prix.
Mais il fallait faire fi de cela. L'heure était à ma mission et je ne devais plus m'en détourner. Oublier les soucis quotidiens car je devenais au-dessus de cela. J'acquerrai un autre statut en voulant sauver des millions de gens et sûrement certains qui ne le souhaitaient pas..
Et quel est mon prix à cela ?
Rien. Je ne demande rien...
Peut-être une reconnaissance, une petite place avec mon nom inscrit,..., une statue...
Et voilà que l'entité humaine reprenait le dessus ! Il faut que je me consacre à mon but, à la qualité de cette ultime approche de la perfection. Mais assez parlé. Je reprends mon travail.
21:14 : J'ai perfectionné la sensibilité de ma future et proche ''gloire". Mais la célébrité n'est que d'un intérêt second. Hier, j'ai rencontré une femme dans un bar. A ce moment, j'ai pensé qu'elle pourrait être l'élue. J'aurai pu fonder un foyer et avoir des enfants mais elle m'a déçue. La soirée s'était bien passée. Nous avons mangé de très bon steaks chez Nickels (seul restaurant accessible, dernier privilège que je m'offrais avant l'ultime rendez-vous ... et le café est à volonté [!]) mais au moment où j'allais la raccompagner, elle m'a demandé de l'argent pour que je rentre avec elle (elle vivait dans un hôtel miteux dans le nord de la ville), surpris, je lui donnais 20 $ et là laissais sur le trottoir tandis qu'elle m'insultait sans raison apparente, me semblait-il. Je me suis dit que je ne la rappellerai pas. Elle ne serait pas une bonne mère. Je décidais de rompre et d'éviter de prolonger mes douleurs crâniennes.
22:04 : Je suis toujours chez moi, dans un appartement stupide et sans cachet, sans style. J'aurais voulu être "spécial" et j'ai l'impression de ne pas appartenir à ce monde de ne être né à la bonne époque, au bon moment, dans le bon pays. J'aurais voulu avoir un corps et un esprit parfait mais non... je dois traîner ma pesante carcasse sur cette terre infâme. Les voisins du dessus font hurler leur stéréo avec une quelconque musique pseudo-branchée. J'ai envie de monter et détruire cet objet-bruit mais je suis conscient de l'extrême nécessité de conserver mon calme. La douleur brûle mon crâne. Bizarrement, j'arrive à situer cette douleur... juste derrière mon oeil gauche. Peut-être qu'en le retirant... mais je chasse cette idée... trop complexe pour ensuite mener à mes opérations.
22:44 : Dehors il fait chaud et humide. Les derniers essais nucléaires effectués dans l'espace ont déclenché un décalage climatique hors-norme. Au lieu des - 20 degrés celsius habituels', j'ai l'impression de me retrouver au Brésil en pleine forêt amazonienne à l'exception des arbres. Les insectes ont tout envahi. L'air est devenu difficilement respirable et depuis presque un an, l'organisation mondiale à l'aide humanitaire avec l'aide des gouvernements a installé des systèmes souterrains de rejets de gaz carbonique et d'apport d'oxygène.
Le pays entier est entouré de ce système et se prolonge dans les autres pays. Le système fonctionne plutôt bien ... je le sais, c'est moi qui l'ai créé. Tout ceci est bien sur confidentiel. J'aurai pu l'expliquer en détail si je n'avais pas les neurones à ébullition. J,ai tout en mémoire même si cette organisation m'a confisqué toutes mes recherches, tous mes plans et toutes mes pensées. Leur lavage de cerveau ne m'a que peu affecté. J'ai simulé cette perte de mémoire sélective tout en continuant à travailler sur la qualité de l'air au laboratoire. Mais les chocs électriques me reviennent sans arrêt en mémoire comme s'ils continuaient à me harceler jusquàu bout.
23:03 : je suis maintenant au laboratoire et il n'y a personne, enfin presque. J'ai du neutraliser un garde " Ce fut facile, c'était un ami ... je crois. Ils ont tellement confiance en leur système d'effacement mémoriel qu'ils n'ont même pas modifiés les différents codes d'accès. Je pénètre sans aucun problème au sein de salles de traitements et d'envoi de l'oxygène. J'infiltre dans les réservoirs d'oxygène près de 450 litres de cyanure comprimés en gaz et installe sous les moteurs centraux une mini-bombe à mercure afin d'éviter toute solution de retour. Mon crâne me lance à un tel point que j'ai du mal à conserver les yeux ouverts. Dehors, tout le monde s'amuse. Attendez-moi, il est 23:56 et dans quatre minutes, ce sera la fête générale. Le pays entier sera au courant, mais n'aura pas le temps de réagir. Mon système est tel que cela se propagera sur 60% de la planète compte tenu des facteurs humidité, vent.
Ça allait être la plus grande, et la plus longue des fêtes du Nouvel An..
Dans quelque minutes, c'est ma fête et je crois que je n'aurais plus jamais mal à la tête.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Super! C'est quoi le titre de ce bouquin j'voudrais le lire...
Bisous

El Ultimo Bastardo a dit…

ben c'est pas un bouquin Chère Barbarella ...c'est juste une pauvre nouvelle que j'ai écrite y a quelques temps .... pour le passer ...justement ce temps ....


...

Anonyme a dit…

Le temps passe à pas de géant
Pas de passe en tout temps
Il n'est pas une impasse
On est en plein dedans
Il passe comme des printemps
Tous les ans...
Mais ceci étant
Ce n'est pas l'important
Moi je voudrais juste lire votre roman...

druzilla a dit…

je te l'avais bien dit! que c'était super!! et puis, tu peux balancer les autres avec!!! Ils vont adorer, je suis sûre!!

El Ultimo Bastardo a dit…

bof ...pas sûr ... mais au moins si ça inspire ...